ARS et Autisme
Publiée le mardi 25 mars

La mise en place du plan autisme 3 met au premier plan les ARS qui vont devoir le mettre en
oeuvre en région. Elle a vite fait apparaître les besoins de formation en autisme des référents
autisme des ARS ainsi que de tous les personnels qui seront amenés à participer à cette mise
en œuvre  ; les personnels qui doivent contrôler les ESMS ont eux aussi un   besoin impératif de
cette formation à l’autisme.

1) Etat des lieux

La mise en œuvre du plan s’est accompagnée d’un état des lieux régional fait par chaque ARS.
La synthèse de ces états des lieux, les appels à projets 2013, la mise en cause d’établissements
dont  le  projet  éducatif  a  été  récusé,  alors  que  la  maltraitance  n’a  jamais  fait  l’objet  de
contrôles  dans  d’autres,   ont  fait  apparaître  un  certain  nombre  de  dysfonctionnements
majeurs, qui ont beaucoup choqué les familles.


Etats des lieux régionaux


a)  Les états des lieux  faits à partir des déclarations des établissements et services médicosociaux  ont fait ressortir la faiblesse des diagnostics d’autisme. Il y a plus de diagnostics
de psychose que d’autisme, mais au moins a-t-on pensé à réunir les deux pour avoir
une  vision  un  peu  plus  claire  de  la  situation.  Alors  que  les  recommandations
diagnostiques pour l’enfant datent de 2005 et les ARS de 2010, on peut se demander
pourquoi il n’y a pas eu de réaction significative à ce scandale de fond : on ne sait pas
où sont les personnes autistes, parce que les ARS ne se sont pas souciées, avec l’aide
des CRA, de vérifier l’usage des recommandations diagnostiques.


b)  Le  poids  des  références  psychanalytiques  reste  majoritaire,  même  s’il  peut
s’accompagner d’un effort par exemple pour construire des outils de communication.
Mais le mélange des références et modes de communication et d’intervention, outre
qu’il est contraire aux recommandations, est nocif pour les personnes accueillies.


c)  Les recommandations de bonnes pratiques de mars 2012 semblent peu connues, et
peu mises en œuvre. Il est vraisemblable que la formation aux interventions éducatives
recommandées est très insuffisante.


d)  La situation des adultes est une catastrophe : mais c’est cohérent avec les chiffres du
plan : 90% des adultes et (68% des enfants) n’ont pas d’accompagnement adapté.

 

Les appels à projets


Le Collectif Egalited  a rédigé un remarquable document d’analyse des appels à projets autisme
2013.  Ce  document  faisait  apparaître  la  faible  qualité  globale  des  cahiers  des  charges  des
appels à projets : les recommandations de bonnes pratiques ne sont souvent pas citées, et le s
cahiers des charges, souvent, ne semblent pas se soucier de l’exigence de qualité des familles,
ni  même  des  besoins  précis  des  personnes  qui  seront  accueillies  dans  ces  futurs
établissements ou services.
La suite, c’est-à-dire les associations à qui ont été donnés certains appels à projets, a soulevé
la colère des familles. Ont souvent été choisies des associations incompétentes en autisme,
ou ne se revendiquant que de la psychanalyse. C’est faire violence aux personnes concernées
et à leurs familles, de  passer ainsi en force pour imposer des gestionnaires à ceux qui n’en
veulent pas.


Le comportement des ARS


Il a suscité la colère des familles pour d’autres raisons. Certaines ARS se sont acharnées sur
des établissements pourtant soucieux de la dignité des usagers et de leurs progrès, au nom de
conceptions archaïques de l’autisme (qui relèverait du «  soin  ») et d’exigences administratives,
totalement à côté de la plaque, quand il s’agit d’accueillir des personnes autistes.
Les ARS ne passent bien sûr rien à ces établissements alors que par ailleurs des formes de
maltraitance, dénoncées par des familles, ou même repérables dans une émission de M6, ne
semblent pas beaucoup perturber certaines ARS  : on peut voir dans l’émission un DG d’ARS
dire qu’il ne risque pas de contrôler tous les services. A quoi sert alors une ARS  ? On trouve
bien du temps pour s’en prendre à ceux qui font leur travail.
Et que dire du DG de l’ARS de Corse qui a fait publiquement la promotion de la psychanalyse ?
Du  projet  d’IME  ABA  de  la  Loire,  pourvu  d’un  financement  ministériel,  qui  s’est  fait  voler
l’argent qu’il avait mis tant d’énergie à obtenir ?

Il y a trois enjeux majeurs pour les ARS :

  1. La formation proprement dite à l’autisme des ARS
  2. L’organisation de la mise en œuvre du plan autisme 3
  3. Le contrôle de l’effectivité du plan dans les champs sanitaire et médicosocial

2) La formation à l’autisme

Il  est  essentiel  qu’elle  associe  des  professionnels  reconnus  de  l’autisme,  avec  des
connaissances actualisée en autisme, et des représentants des associations d’usagers. Un des enjeux  du  plan  3,  c’est  en  effet  la  participation  des  usagers,  et  il  est  important  que  les
associations puissent faire comprendre aux ARS ce qu’elles attendent de ce plan, en termes
d’évolution de l’offre médico-sociale, notamment.
Il existe la circulaire de 1998 sur la formation continue des personnels à l’autisme, mais elle
visait les travailleurs sociaux :

http://www.cra-rhone-alpes.org/IMG/html/Circ-1998-04-formation_continue.html

Il n’existe donc rien qui réponde à la demande spécifique de formation des personnels des
ARS.
La  formation  doit  associer  la  connaissance  précise  de  l’autisme,  des  différentes
recommandations  de  bonnes  pratiques,  des  différents  programmes  d’apprentissage,  des
moyens  d’actualiser  en  permanence  les  connaissances,  des  enjeux  de  santé  publique  que
l’autisme représente, des enjeux financiers.
A cet égard, rappelons l’article L 246-1 du CASF :

Toute personne atteinte du handicap résultant du syndrome autistique et des troubles qui
lui sont apparentés bénéficie, quel que soit son âge, d'une prise en charge pluridisciplinaire
qui tient compte de ses besoins et difficultés spécifiques.
Adaptée à l'état et à l'âge de la personne, cette prise en charge peut être d'ordre éducatif,
pédagogique, thérapeutique et social.
Il en est de même des personnes atteintes de polyhandicap.

Les  personnels  des  ARS  en  charge  des  dossiers  de  l’autisme  doivent  aussi  connaître  la
jurisprudence  en la matière, car les familles commencent à judiciariser leurs combats, faute
d’avoir pu faire admettre la situation dramatique dans laquelle elles se débattent, pour une
grande majorité.
Cette formation est particulièrement importante pour les référents autisme des ARS, qui sont
souvent des médecins, dont la formation en autisme se limite parfois à l’idéologie freudo lacanienne. Cette vision totalement dépassée est dramatique, quand il s’agit de personnes qui
vont pouvoir influencer la politique de l’autisme dans leur région.


On est en droit d’attendre des médecins dans les ARS qu’ils donnent l’exemple et appliquent
ces deux articles du Code de déontologie médicale et du Code de Santé Publique :


Article 11 et 13 du Code de déontologie médicale, édition 2012 :

Article 11 (article R.4127-11 du CSP)
Tout  médecin  entretient  et  perfectionne  ses  connaissances  dans  le  respect  de  son
obligation de développement professionnel continu.


Article 13 (article R.4127-13 du CSP)
Lorsque le médecin participe à une action d’information du public de caractère éducatif
et sanitaire, quel qu’en soit le moyen de diffusion, il doit ne faire état que de données
confirmées, faire preuve de prudence et avoir le souci des répercussions de ses propos
auprès du public.
Et l’article ajoute :
Il doit se garder à cette occasion de toute attitude publicitaire, soit personnelle, soit en
faveur des organismes où il exerce ou auxquels il prête son concours, soit en faveur
d’une cause qui ne soit pas d’intérêt général.


3) La mise en œuvre du plan autisme 3


Nous demandons aux ARS de faire connaître leurs référents autisme, et d’en fournir la liste
entière.


a)  Le travail urgent de diagnostic

Nous attendons des ARS qu’elles mobilisent l’ensemble  des services sanitaires et
médico-sociaux,  par  exemple  avec  des  équipes  diagnostiques  mobiles,  pour
qu’elles  repèrent  efficacement  les  personnes  autistes,  enfants  comme  adultes.
C’est  essentiel  pour  pouvoir  apporter  aux  personnes  concernées  le  soutien
éducatif nécessaire. En effet l’absence de ce soutien éducatif est une maltraitance
par défaut.


b)  L’intervention précoce

Il y a bien  longtemps  que  devrait  exister, dans  chaque département, un service
compétent, avec des interventions adaptées conformes aux recommandations de
bonnes pratiques. C’est le seul moyen de ne pas mettre en danger les enfants en
les surhandicapant, faute d’intervention précoce.


c)  L’évolution de l’offre médico-sociale

Beaucoup d’ESMS ne sont pas du tout conformes aux exigences de qualité. Nous
demandons aux ARS de faire toute la transparence sur leurs pratiques, afin que les
familles soient informées.
L’offre  est  peu  satisfaisante  : pas  assez de  SESSAD,  surtout  pour  les  tout-petits,
quasiment pas de  SAMSAH, aucune  solution  pour  imaginer  la  vigilance dans les
logements  adaptés,  trop  d’IME  généralistes  qui  accueillent  des  enfants  autistes
sans soutien adapté, et d’abord sans diagnostic, des listes d’attente faramineuses
dans les FAM qui répondent à la demande de qualité éducative sans espoir de les
combler, des IME à transformer en SESSAD, etc..
Par ailleurs, il va bien falloir harmoniser, outre les pratiques, les financements (les
prix de journée varient dans des conditions considérables, entre autres via les CG),
et les ratios d’encadrement.


d)  Les UE en maternelle

Nous attendons que les ARS fassent la liste des supports des premières UE, pour
que les familles soient informées et que les associations puissent suivre leur travail.

e)  La formation des personnels

Les  ARS  pourraient-elles  se  pencher  sur  le  maquis des formations  ?  Si  l’on peut
continuer  à  enseigner  n’importe  quoi  en  autisme,  le  changement  des  pratiques
n’aura jamais lieu.
Article L. 1110-1-1 CSP
Rédaction de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005
Les  professionnels  de  santé  et  du  secteur  médico-social  reçoivent,  au  cours  de  leur
formation  initiale  et  continue,  une  formation  spécifique  concernant  l’évolution  des
connaissances  relatives  aux  pathologies  à  l’origine  des  handicaps  et  les  innovations
thérapeutiques,  technologiques,  pédagogiques,  éducatives  et  sociales  les  concernant,
l’accueil  et  l’accompagnement  des  personnes  handicapées,  ainsi  que  l’annonce  du
handicap.


f)  Le respect de toutes les recommandations de bonnes pratiques

Elles  restent  peu  connues  des  ARS,  donc  peu  diffusées,  et  très  peu  mises  en
pratiques.  Elles  sont  pourtant  opposables,  sauf  si  pour  des  cas  individuels,  un
médecin, dans sa liberté de jugement, les estime contraires à l’intérêt du malade.
Il  est  donc  insupportable  de  voir  des  établissements  entiers,  surtout  sanitaires,
mais  aussi  médico-sociaux,  refuser  de  les  respecter.  Et  même  s’il  y  a  un  cas
individuel, ce dernier ne saurait empêcher l’accès à un deuxième avis médical, que
le médecin réticent doit favoriser, selon le CSP.


http://www.conseil-national.medecin.fr/sites/default/files/2emeavis.pdf


Voir arrêt Kerkerian, 2005 et arrêt Formindep, 2011, du Conseil d’Etat


   L’article L. 1110-5 CSP rappelle d’ailleurs que « toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l’urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir les soins les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l’efficacité est reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire au regard des connaissances médicales avérées ».


http://sofia.medicalistes.org/spip/IMG/pdf/La_portee_juridique_des_recommandations_de_la_HAS_les_appliquer_ou_ne_pas_les_appliquer.pdf

 

g)  Les appels à projets

Ce sont des appels d’offres déguisés avec attribution d’argent public. Il est donc
important que les ARS militent pour obtenir que ces appels «   à projets  » donnent
lieu  à  de  véritables  délégations  de  service  public  attribuées  de  manière
transparente et contrôlées, puisqu’il s’agit d’argent public.
Il  n’est  plus  acceptable  que  l’argent  public  soit  donné  à  des  associations
gestionnaires qui s’abritent derrière leur projet associatif pour ne pas respecter la
politique de santé publique en autisme, qui fait consensus parmi les usagers.

 

4) Le contrôle de l’effectivité du plan dans les champs sanitaire et médico-social


a)  La transparence sur les pratiques dans les établissements sanitaire et médico -social

Il  est  indispensable  que  les  ARS  rendent  publiques  les  pratiques  de  tous  les
établissements sanitaires et médico-sociaux. En effet l’état des lieux qui a été fait ne
concerne pas le sanitaire. Or, il faut savoir où est l’argent de l’autisme, et ce qu’on fait
de cet argent.


b)  Que sont devenues les « places » avec un agrément autisme ?

Autisme  France  avait  fait  en  2000  un  document  sur  les  «  places  »  qui  avaient  un
agrément  autisme.  Le  constat  avait  été  fait  que  ces  places  étaient  rarement
spécifiques.
Il conviendrait que les ARS fassent cette enquête.


c)  Le contrôle des services sanitaires

Il est impératif que les services sanitaires respectent aussi les recommandations de
bonnes pratiques et rendent compte de leur manière de faire avancer la modification
des  pratiques.  Il  faut  pour  cela  adapter  les  critères  de  certification  accordés  aux
établissements sanitaires.


d)  La mise en place de vrais parcours coordonnés

C’était déjà une mesure du plan autisme 2 mais qui n’a jamais vu le jour.
Le  médico-social  fonctionne  comme  un  ghetto  de  fait,  faute  de  souplesse,  et  de
formation des MDPH à ce que pourrait être un parcours coordonné.
Un IME ne fonctionne pas comme plate-forme de soutien éducatif, un FAM ne permet
pas  de  travailler  partiellement,  les  services  sont  rarissimes  alors  qu’il  faut  les
privilégier.
Nos  enfants  n’ont  rien  à  faire  à  l’hôpital  psychiatrique,  en  dehors  de  situations
ponctuelles  et  précises.  Les  HP  sont  souvent,  par  ailleurs,  les  plus  mal  formés  à
l’autisme.


e)  La construction de grilles adaptées à l’autisme

Un référentiel autisme est en cours de conception. Il appartiendra aux ARS de modifier
en conséquence les grilles qui servent au contrôle des ESMS, qui ne sont pas du tout
adaptées  à  l’exigence  de  qualité  nécessaire  au  bon  fonctionnement  de  ces
établissements et services.
Les ARS devront en effet contrôler l’effectivité de la qualité dans les ESMS, et celle de
la transformation de l’offre médico-sociale.