La mise en place du plan autisme 3 met au premier plan les ARS qui vont devoir le mettre en
oeuvre en région. Elle a vite fait apparaître les besoins de formation en autisme des référents
autisme des ARS ainsi que de tous les personnels qui seront amenés à participer à cette mise
en œuvre ; les personnels qui doivent contrôler les ESMS ont eux aussi un besoin impératif de
cette formation à l’autisme.
1) Etat des lieux
La mise en œuvre du plan s’est accompagnée d’un état des lieux régional fait par chaque ARS.
La synthèse de ces états des lieux, les appels à projets 2013, la mise en cause d’établissements
dont le projet éducatif a été récusé, alors que la maltraitance n’a jamais fait l’objet de
contrôles dans d’autres, ont fait apparaître un certain nombre de dysfonctionnements
majeurs, qui ont beaucoup choqué les familles.
Etats des lieux régionaux
a) Les états des lieux faits à partir des déclarations des établissements et services médicosociaux ont fait ressortir la faiblesse des diagnostics d’autisme. Il y a plus de diagnostics
de psychose que d’autisme, mais au moins a-t-on pensé à réunir les deux pour avoir
une vision un peu plus claire de la situation. Alors que les recommandations
diagnostiques pour l’enfant datent de 2005 et les ARS de 2010, on peut se demander
pourquoi il n’y a pas eu de réaction significative à ce scandale de fond : on ne sait pas
où sont les personnes autistes, parce que les ARS ne se sont pas souciées, avec l’aide
des CRA, de vérifier l’usage des recommandations diagnostiques.
b) Le poids des références psychanalytiques reste majoritaire, même s’il peut
s’accompagner d’un effort par exemple pour construire des outils de communication.
Mais le mélange des références et modes de communication et d’intervention, outre
qu’il est contraire aux recommandations, est nocif pour les personnes accueillies.
c) Les recommandations de bonnes pratiques de mars 2012 semblent peu connues, et
peu mises en œuvre. Il est vraisemblable que la formation aux interventions éducatives
recommandées est très insuffisante.
d) La situation des adultes est une catastrophe : mais c’est cohérent avec les chiffres du
plan : 90% des adultes et (68% des enfants) n’ont pas d’accompagnement adapté.
Les appels à projets
Le Collectif Egalited a rédigé un remarquable document d’analyse des appels à projets autisme
2013. Ce document faisait apparaître la faible qualité globale des cahiers des charges des
appels à projets : les recommandations de bonnes pratiques ne sont souvent pas citées, et le s
cahiers des charges, souvent, ne semblent pas se soucier de l’exigence de qualité des familles,
ni même des besoins précis des personnes qui seront accueillies dans ces futurs
établissements ou services.
La suite, c’est-à-dire les associations à qui ont été donnés certains appels à projets, a soulevé
la colère des familles. Ont souvent été choisies des associations incompétentes en autisme,
ou ne se revendiquant que de la psychanalyse. C’est faire violence aux personnes concernées
et à leurs familles, de passer ainsi en force pour imposer des gestionnaires à ceux qui n’en
veulent pas.
Le comportement des ARS
Il a suscité la colère des familles pour d’autres raisons. Certaines ARS se sont acharnées sur
des établissements pourtant soucieux de la dignité des usagers et de leurs progrès, au nom de
conceptions archaïques de l’autisme (qui relèverait du « soin ») et d’exigences administratives,
totalement à côté de la plaque, quand il s’agit d’accueillir des personnes autistes.
Les ARS ne passent bien sûr rien à ces établissements alors que par ailleurs des formes de
maltraitance, dénoncées par des familles, ou même repérables dans une émission de M6, ne
semblent pas beaucoup perturber certaines ARS : on peut voir dans l’émission un DG d’ARS
dire qu’il ne risque pas de contrôler tous les services. A quoi sert alors une ARS ? On trouve
bien du temps pour s’en prendre à ceux qui font leur travail.
Et que dire du DG de l’ARS de Corse qui a fait publiquement la promotion de la psychanalyse ?
Du projet d’IME ABA de la Loire, pourvu d’un financement ministériel, qui s’est fait voler
l’argent qu’il avait mis tant d’énergie à obtenir ?
Il y a trois enjeux majeurs pour les ARS :
- La formation proprement dite à l’autisme des ARS
- L’organisation de la mise en œuvre du plan autisme 3
- Le contrôle de l’effectivité du plan dans les champs sanitaire et médicosocial
2) La formation à l’autisme
Il est essentiel qu’elle associe des professionnels reconnus de l’autisme, avec des
connaissances actualisée en autisme, et des représentants des associations d’usagers. Un des enjeux du plan 3, c’est en effet la participation des usagers, et il est important que les
associations puissent faire comprendre aux ARS ce qu’elles attendent de ce plan, en termes
d’évolution de l’offre médico-sociale, notamment.
Il existe la circulaire de 1998 sur la formation continue des personnels à l’autisme, mais elle
visait les travailleurs sociaux :
http://www.cra-rhone-alpes.org/IMG/html/Circ-1998-04-formation_continue.html
Il n’existe donc rien qui réponde à la demande spécifique de formation des personnels des
ARS.
La formation doit associer la connaissance précise de l’autisme, des différentes
recommandations de bonnes pratiques, des différents programmes d’apprentissage, des
moyens d’actualiser en permanence les connaissances, des enjeux de santé publique que
l’autisme représente, des enjeux financiers.
A cet égard, rappelons l’article L 246-1 du CASF :
Toute personne atteinte du handicap résultant du syndrome autistique et des troubles qui
lui sont apparentés bénéficie, quel que soit son âge, d'une prise en charge pluridisciplinaire
qui tient compte de ses besoins et difficultés spécifiques.
Adaptée à l'état et à l'âge de la personne, cette prise en charge peut être d'ordre éducatif,
pédagogique, thérapeutique et social.
Il en est de même des personnes atteintes de polyhandicap.
Les personnels des ARS en charge des dossiers de l’autisme doivent aussi connaître la
jurisprudence en la matière, car les familles commencent à judiciariser leurs combats, faute
d’avoir pu faire admettre la situation dramatique dans laquelle elles se débattent, pour une
grande majorité.
Cette formation est particulièrement importante pour les référents autisme des ARS, qui sont
souvent des médecins, dont la formation en autisme se limite parfois à l’idéologie freudo lacanienne. Cette vision totalement dépassée est dramatique, quand il s’agit de personnes qui
vont pouvoir influencer la politique de l’autisme dans leur région.
On est en droit d’attendre des médecins dans les ARS qu’ils donnent l’exemple et appliquent
ces deux articles du Code de déontologie médicale et du Code de Santé Publique :
Article 11 et 13 du Code de déontologie médicale, édition 2012 :
Article 11 (article R.4127-11 du CSP)
Tout médecin entretient et perfectionne ses connaissances dans le respect de son
obligation de développement professionnel continu.
Article 13 (article R.4127-13 du CSP)
Lorsque le médecin participe à une action d’information du public de caractère éducatif
et sanitaire, quel qu’en soit le moyen de diffusion, il doit ne faire état que de données
confirmées, faire preuve de prudence et avoir le souci des répercussions de ses propos
auprès du public.
Et l’article ajoute :
Il doit se garder à cette occasion de toute attitude publicitaire, soit personnelle, soit en
faveur des organismes où il exerce ou auxquels il prête son concours, soit en faveur
d’une cause qui ne soit pas d’intérêt général.
3) La mise en œuvre du plan autisme 3
Nous demandons aux ARS de faire connaître leurs référents autisme, et d’en fournir la liste
entière.
a) Le travail urgent de diagnostic
Nous attendons des ARS qu’elles mobilisent l’ensemble des services sanitaires et
médico-sociaux, par exemple avec des équipes diagnostiques mobiles, pour
qu’elles repèrent efficacement les personnes autistes, enfants comme adultes.
C’est essentiel pour pouvoir apporter aux personnes concernées le soutien
éducatif nécessaire. En effet l’absence de ce soutien éducatif est une maltraitance
par défaut.
b) L’intervention précoce
Il y a bien longtemps que devrait exister, dans chaque département, un service
compétent, avec des interventions adaptées conformes aux recommandations de
bonnes pratiques. C’est le seul moyen de ne pas mettre en danger les enfants en
les surhandicapant, faute d’intervention précoce.
c) L’évolution de l’offre médico-sociale
Beaucoup d’ESMS ne sont pas du tout conformes aux exigences de qualité. Nous
demandons aux ARS de faire toute la transparence sur leurs pratiques, afin que les
familles soient informées.
L’offre est peu satisfaisante : pas assez de SESSAD, surtout pour les tout-petits,
quasiment pas de SAMSAH, aucune solution pour imaginer la vigilance dans les
logements adaptés, trop d’IME généralistes qui accueillent des enfants autistes
sans soutien adapté, et d’abord sans diagnostic, des listes d’attente faramineuses
dans les FAM qui répondent à la demande de qualité éducative sans espoir de les
combler, des IME à transformer en SESSAD, etc..
Par ailleurs, il va bien falloir harmoniser, outre les pratiques, les financements (les
prix de journée varient dans des conditions considérables, entre autres via les CG),
et les ratios d’encadrement.
d) Les UE en maternelle
Nous attendons que les ARS fassent la liste des supports des premières UE, pour
que les familles soient informées et que les associations puissent suivre leur travail.
e) La formation des personnels
Les ARS pourraient-elles se pencher sur le maquis des formations ? Si l’on peut
continuer à enseigner n’importe quoi en autisme, le changement des pratiques
n’aura jamais lieu.
Article L. 1110-1-1 CSP
Rédaction de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005
Les professionnels de santé et du secteur médico-social reçoivent, au cours de leur
formation initiale et continue, une formation spécifique concernant l’évolution des
connaissances relatives aux pathologies à l’origine des handicaps et les innovations
thérapeutiques, technologiques, pédagogiques, éducatives et sociales les concernant,
l’accueil et l’accompagnement des personnes handicapées, ainsi que l’annonce du
handicap.
f) Le respect de toutes les recommandations de bonnes pratiques
Elles restent peu connues des ARS, donc peu diffusées, et très peu mises en
pratiques. Elles sont pourtant opposables, sauf si pour des cas individuels, un
médecin, dans sa liberté de jugement, les estime contraires à l’intérêt du malade.
Il est donc insupportable de voir des établissements entiers, surtout sanitaires,
mais aussi médico-sociaux, refuser de les respecter. Et même s’il y a un cas
individuel, ce dernier ne saurait empêcher l’accès à un deuxième avis médical, que
le médecin réticent doit favoriser, selon le CSP.
http://www.conseil-national.medecin.fr/sites/default/files/2emeavis.pdf
Voir arrêt Kerkerian, 2005 et arrêt Formindep, 2011, du Conseil d’Etat
L’article L. 1110-5 CSP rappelle d’ailleurs que « toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l’urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir les soins les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l’efficacité est reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire au regard des connaissances médicales avérées ».
http://sofia.medicalistes.org/spip/IMG/pdf/La_portee_juridique_des_recommandations_de_la_HAS_les_appliquer_ou_ne_pas_les_appliquer.pdf
g) Les appels à projets
Ce sont des appels d’offres déguisés avec attribution d’argent public. Il est donc
important que les ARS militent pour obtenir que ces appels « à projets » donnent
lieu à de véritables délégations de service public attribuées de manière
transparente et contrôlées, puisqu’il s’agit d’argent public.
Il n’est plus acceptable que l’argent public soit donné à des associations
gestionnaires qui s’abritent derrière leur projet associatif pour ne pas respecter la
politique de santé publique en autisme, qui fait consensus parmi les usagers.
4) Le contrôle de l’effectivité du plan dans les champs sanitaire et médico-social
a) La transparence sur les pratiques dans les établissements sanitaire et médico -social
Il est indispensable que les ARS rendent publiques les pratiques de tous les
établissements sanitaires et médico-sociaux. En effet l’état des lieux qui a été fait ne
concerne pas le sanitaire. Or, il faut savoir où est l’argent de l’autisme, et ce qu’on fait
de cet argent.
b) Que sont devenues les « places » avec un agrément autisme ?
Autisme France avait fait en 2000 un document sur les « places » qui avaient un
agrément autisme. Le constat avait été fait que ces places étaient rarement
spécifiques.
Il conviendrait que les ARS fassent cette enquête.
c) Le contrôle des services sanitaires
Il est impératif que les services sanitaires respectent aussi les recommandations de
bonnes pratiques et rendent compte de leur manière de faire avancer la modification
des pratiques. Il faut pour cela adapter les critères de certification accordés aux
établissements sanitaires.
d) La mise en place de vrais parcours coordonnés
C’était déjà une mesure du plan autisme 2 mais qui n’a jamais vu le jour.
Le médico-social fonctionne comme un ghetto de fait, faute de souplesse, et de
formation des MDPH à ce que pourrait être un parcours coordonné.
Un IME ne fonctionne pas comme plate-forme de soutien éducatif, un FAM ne permet
pas de travailler partiellement, les services sont rarissimes alors qu’il faut les
privilégier.
Nos enfants n’ont rien à faire à l’hôpital psychiatrique, en dehors de situations
ponctuelles et précises. Les HP sont souvent, par ailleurs, les plus mal formés à
l’autisme.
e) La construction de grilles adaptées à l’autisme
Un référentiel autisme est en cours de conception. Il appartiendra aux ARS de modifier
en conséquence les grilles qui servent au contrôle des ESMS, qui ne sont pas du tout
adaptées à l’exigence de qualité nécessaire au bon fonctionnement de ces
établissements et services.
Les ARS devront en effet contrôler l’effectivité de la qualité dans les ESMS, et celle de
la transformation de l’offre médico-sociale.